Un jour de météo désespérante en montagne, nous nous rabattîmes sur le tourisme en auto, au col de l’Iseran, avec son refuge très accueillant, surtout par le froid et la neige.

En redescendant de Val d’Isère, le guide nous dirigea vers l’église baroque de La Gurraz : y mène une route étroite, très pentue, lacets et surplombs impressionnants. Le village est perché sur un éperon rocheux étroit au bout duquel se trouve l’église promise, qui se voit d’ailleurs de la route principale, sur l’autre rive de l’Isère. Les derniers séracs du glacier Sud de La Gurraz, qui descend du Mont Pourri, émergent du nuage et surplombent directement le village, de façon un peu menaçante.

Les chalets de La Gurraz ont conservé l’architecture traditionnelle, avec des greniers à foin qui rappellent ceux du Queyras. Tout suggère ici une vie rude dans un environnement magnifique mais solitaire et peu accueillant.

L’église était fermée, et ses voisins ne savaient pas où se procurer la clé, mais en retournant à la voiture nous vîmes que l’école minuscule était ouverte : ce dimanche était jour d’élections municipales. Le maire adjoint se proposa d’aller chercher la clé pour nous ouvrir l’église, et en chemin nous expliqua le motif des élections : La Gurraz est une section de la commune de Villaroger, c’est-à-dire que les élections ont lieu par section, avec quatre conseillers pour La Gurraz et sept pour Villaroger chef-lieu. Les habitants du chef-lieu, majoritaires (250 habitants contre 150) voulaient voter l’abandon du système de sections, mais ceux de La Gurraz ne voulaient pas en entendre parler, et pour s’y opposer élisaient des conseillers qui démissionnaient au bout d’un mois, d’où nouvelles élections, et ce si j’ai bien compris tous les deux mois depuis 2008.
L’église Saint-Roch de La Gurraz mérite bien un petit crochet, avec notamment une chaire marquetée magnifique.
Nous voulions comprendre un peu mieux cette querelle de clocher. Déjà en regardant la carte on observe une bizarrerie : La Gurraz est à 11 km du chef-lieu de Villaroger, alors que des localités de la rive droite de l’Isère sont plus proches. Sainte-Foy Tarentaise, commune de son propre chef, est bien plus proche de Villaroger que La Gurraz. Mais l’Isère passe entre les deux, et jusqu’à une époque récente les ponts étaient rares et le franchissement hasardeux après une pluie un peu substantielle.
Le guide mentionnait une église baroque à Villaroger : nous décidâmes donc d’être équitables, et de visiter les deux. L’arrivée à Villaroger, 11 km plus loin et 600 m d’altitude plus bas, nous fit tout de suite comprendre pourquoi les habitants de ces deux localités ne pourraient jamais s’entendre : nous étions dans un autre monde, sous un autre climat. Dès l’arrivée sur la place de l’église on ressent une ambiance quasi-méditerranéenne, confirmée par les contacts avec les habitants (pour se faire ouvrir l’église, toujours). Le paysage n’est pas non plus le même : on est passé de la haute montagne à une vallée
boisée.

Comment résoudre ce différent : un redécoupage communal plus conforme à la géographie ?