Blog de Laurent Bloch
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ISSN 2271-3980
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Entre l’Iran, l’Irak et Israël au long du vingtième siècle :
Shlomo le Kurde
de Samir Naqqash

Article mis en ligne le 31 juillet 2015

par Laurent Bloch

Shlomo le Kurde (éd. Galaade) est un livre foisonnant, riche en événements historiques et en milieux humains peu connus du public français ; la trajectoire du personnage doit beaucoup à l’histoire familiale de l’auteur.

L’auteur

Les lignes de cette section sont empruntées à la notice de l’éditeur.

« Samir Naqqash est né à Bagdad (Irak) en 1938. Il faisait partie d’une de ces familles juives qui ont été forcées de quitter l’Irak dans les années 1950. Il était adolescent lorsqu’il s’est retrouvé en Israël, mais ne s’est jamais senti chez lui dans ce pays. Il se sentait en effet expulsé du paradis où il avait passé son enfance : Bagdad. Aussi n’a-t-il jamais pardonné aux États irakien et israélien d’avoir abandonné la plus ancienne diaspora juive. Et il a tenté de quitter Israël à plusieurs reprises, pour l’Iran, l’Inde, la Turquie, le Liban, l’Égypte et l’Angleterre. Mais il a fini par rentrer en Israël où il est mort en 2004 dans la banlieue de Tel-Aviv.

Samir Naqqash se considérait comme un écrivain irakien en exil. C’est ce pourquoi il a fait le choix difficile d’écrire en arabe, ce qui l’a coupé à la fois d’un lectorat potentiel en Israël et d’un lectorat arabe du fait qu’il soit juif. Aussi son œuvre est-elle restée malheureusement confidentielle : peu lu dans le monde arabe, même s’il est très apprécié de nombreux écrivains irakiens contemporains et de quelques intellectuels arabes et tout aussi peu lu en Israël en dehors de la communauté juive d’origine irakienne, un seul de ses livres ayant été traduit en hébreu. Cependant Naguib Mahfouz, prix Nobel de littérature, le considérait comme “l’un des plus grands auteurs à écrire en arabe aujourd’hui”.

Plusieurs chercheurs ont souligné l’importance de l’arabe dialectal dans l’œuvre de Samir Naqqash, puisque dans ses nouvelles il fait usage tantôt de l’arabe dialectal irakien standard — celui de la communauté musulmane en réalité — tantôt de celui de la communauté juive.

Samir Naqqash est l’auteur d’une œuvre importante : une dizaine de titres, dans des genres différents : romans, recueils de nouvelles, pièces de théâtre. Ses livres écrits tous en arabe, publiés en Israël ou en Allemagne (Al-Kamel Verlag, Cologne), ont été écrits après son arrivée en Israël. Il fut aussi traducteur de l’hébreu vers l’arabe. »

Le livre

Comme son nom et son surnom le suggèrent le héros du livre est un juif kurde de l’Azerbaïdjan iranien (l’antique Médie Atropatène) ; au début du XXe siècle il conduit ses caravanes de mules à Moscou, Téhéran, Istamboul et les ramène chargées de samovars, de fusils, de munitions, de tissus et d’autres denrées, avec ses associés juifs ou musulmans. Au fil de ces péripéties Shlomo le Kurde s’attire le courroux du shah Ahmad qui le soupçonne de trafic d’armes pour susciter une révolte kurde, le fait fouetter et emprisonner. Cette contrée voit s’affronter pendant la guerre de 1914-1918 les troupes ottomanes, russes puis soviétiques, anglaises et persanes. La guerre le contraindra à l’exil à Bagdad avec sa famille en abandonnant tous ses biens. Après des années misérables il s’embarque pour Bombay pour refaire fortune en lançant à Bagdad le commerce de vêtements d’occasion anglais. Mais le pogrom (Farhoud) des 1er et 2 juin 1941, pendant la fête juive de Chavouot, annéantira à nouveau sa position.

Il y a bien d’autres péripéties et on en apprend beaucoup sur une région et des cultures peu connues sous nos climats. Le livre est disponible au format électronique.